Giovanni Battista Franco
Venise, vers 1510 – Venise, 1561
Descente de croix
Pierre noire, plume et encre brune sur papier.
186 x 173 mm – 7 5/16 x 6 13/16 in.
Provenance :
– Francfort-sur-le-Main, galerie Joseph Fach[1].
– Dessau, collection particulière[2].
– New York-Düsseldorf, C. G. Boerner, catalogue 2021, n° 2.
Né à Venise, Giovanni Battista Franco se forma auprès de son père Jacopo. Il se rendit, vers 1530, à Rome où il réalisa un grand nombre de dessins d’après l’antique puis d’après les fresques de Michel-Ange, Raphaël et Polidoro da Caravaggio. En 1536, l’architecte et sculpteur Raffaello da Montelupo lui demanda de contribuer à la décoration d’un arc pour l’entrée triomphale de l’empereur Charles Quint. Il participa ensuite, à Florence, avec Giorgio Vasari, à l’élaboration des préparatifs du mariage du duc Alexandre de Médicis et de Marguerite d’Autriche et, en 1539, à celui de Cosme 1er et d’Éléonore de Tolède. Après des séjours à Rome et Urbino, il regagna, à partir de 1552, sa ville natale, exécutant des retables et des décors de palais. Peintre, graveur et surtout dessinateur, il est réputé pour son style élégant et raffiné.
Notre feuille est une des trois études préparatoires connues pour le tableau de la Déposition du Christ (fig. 1), conservé au Museo Nazionale di Villa Guinigi à Lucques[3]. Giovanni Battista Franco a réalisé cette toile évoquant un épisode de la Passion du Christ, vers 1537, lors de son séjour dans cette ville[4].
Les deux autres esquisses de composition pour cette œuvre sont aujourd’hui conservées à la Biblioteca Ambrosiana de Milan (fig. 2, inv. 426) [5]et au Museum Boijmans à Rotterdam (fig. 3, inv. I 118)[6]. Celle de Milan paraît être un peu antérieure aux deux autres. Le centre de la feuille est occupé par la composition de la scène de la Passion et les bords sont remplis d’esquisses rapides de détails anatomiques et d’études de visages. Dans celle de Rotterdam, Giovanni Battista Franco a repris la scène principale, se concentrant sur le cadrage des deux groupes de personnages, au premier plan les saintes femmes agenouillées au côté de la Vierge qui soutient le corps de son fils et, sur la droite, un groupe d’hommes debout. On perçoit quelques traits derrière la tête de la Vierge indiquant l’intention de l’artiste de remplir l’espace par le contour d’une tête de femme qu’il reprendra également dans notre feuille.
Bien que notre esquisse ait subi les dommages du temps, certaines parties révèlent l’extrême finesse du trait de plume de Giovanni Battista Franco comme le réseau de hachures croisées sur le vêtement de Marie. Dès cette première phase de conception, il a élaboré rapidement l’agencement des protagonistes tout en mettant l’accent sur le rendu du visage de Marie marqué par l’affliction. Dans le tableau final, l’artiste ne retient pas tous les éléments mis en place : il reprend la position du corps de Jésus soutenu par Marie, tout en modifiant légèrement l’inclinaison de la tête de la Vierge, tournée vers la droite comme s’il avait voulu atténuer la douleur de Marie.
Lors de son séjour à Rome entre 1530 et 1536, l’artiste a été très marqué par Michel-Ange, réalisant des dessins d’après ses œuvres ou s’imprégnant de motifs qu’il réutilise dans les siennes. Ainsi, l’attitude du corps nu du Christ mort avec ses avant-bras pendants est reprise de l’homme ivre au premier plan de la Bacchanale des enfants[7] (fig. 4, détail) du maître florentin.
Constat d’état – Dessin très effacé mais dont on perçoit encore l’élégance et la délicatesse. Anciennes taches d’humidité.
[1] Cf. Anne Varick Lauder, Battista Franco c. 1510-1561. His Life and Work with Catalogue Raisonné, 4 vol., Thèse de doctorat, University of Cambridge, 2004, II, p. 326-327, n° 64 DA, IV, fig. 130.
[2] Anne Varick Lauder, Battista Franco, Inventaire général des dessins italiens, Tome VIII, Musée du Louvre, Département des arts graphiques, Officina Libraria, Milan, 2009, p. 182.
[3] Déposition du Christ, Huile sur toile, 1370 x 998 mm, Lucques, Museo Nazionale di Villa Guinigi, inv. 128.
[4] Anne Varick Lauder, Battista Franco, Inventaire général des dessins italiens, Tome VIII, Musée du Louvre, Département des arts graphiques, Officina Libraria, Milan, 2009, p. 23 : Franco se rendit sans doute également à Lucques vers 1537 pour exécuter la toile très michelangélesque et non documentée de la Déposition…
[5] Codex F245 Inf. n° 31, Inv. 426, Plume et encre brune ; 440 x 285 mm.
[6] Descente de Croix, Plume et encre brune, 260 x 191 mm, Rotterdam, Museum Boijmans, Inv. Je 118 (PK).
[7] Windsor, Collection Royale, inv. 912777.